Un poème en partage
Habitant et promeneur régulier du Grazel, Bernard Leveaux a été profondément touché par la stèle récemment érigée en ce lieu emblématique de Gruissan. Témoin de son importance, il a ressenti avec émotion la disparition de la plaque qui l’accompagnait.
Face à cette absence, il a souhaité exprimer son ressenti à travers un poème, un témoignage personnel qu’il a tenu à adresser à Monsieur le Maire.
Cet élan de sensibilité rappelle combien nos espaces publics sont porteurs de mémoire et de symboles forts pour notre communauté. La Ville de Gruissan remercie ce citoyen pour son attachement à notre patrimoine et partage son émotion avec l’ensemble des habitants.
Nuits et écumes
Bernard Leveaux, Gruissan, fin 2024
Tandis que le jour déclinait,
Que mon ombre se dessinait
Toujours plus longue sur le Grazel
J’aperçus, celle d’une stèle
Tout nouvellement érigée.
Vers elle, je me suis dirigé.
Une première vague de métal
Submergeait les quelques bouées
Tandis que d’autres plus létales
Se dressaient telles des épées
Pointées sur les têtes de migrants
Disparus, mêmes les enfants !
Une bribe du poème « Home »
Posée au pied, tel un psaume,
Eclairait « La Vague Alarme »
Rappelant aux passants leurs larmes.
Personne ne quitte sa maison…
Si elle n’est d’un fusil le canon…
Le lendemain, l’astre solaire
Dorait la stèle aux disparus.
Dans un appel à la prière
Je m’approchais de la statue.
Au cœur un vrai coup de lance
Plus de plaque du souvenance.
Arrachée, les goujons tordus
Son droit du sol pourfendu !
Restait un cadre vide, profané.
SOS méditerranée.
Nos derniers cris, recueillis
En narbonnais, dérangeaient.
La fosse commune virtuelle
Erigée au bord du Grazel
Était de trop, elle insupportait.
Quel crime avions-nous commis ?
A jamais, soyez rassurés
Nous ne poserons le pied
Sur votre terre, votre bitume.
Rejetés dans le noir des nuits
Laissés au milieu des écumes
Interdits de poursuivre nos vies !
Que les colombes qui jaillissent
De la sculpture de Kamel,
Transcendent notre supplice
Eclairent ton irrationnel.
Il faut que tu comprennes avec le cœur.
Seule la bonté amène le vrai bonheur.